Les Epoux.

Ils s'en vont sur la route qui s'étend derrière eux,
Ce long chemin qu'ensemble ils ont choisi de faire,
Quand ils avaient vingt ans et qu'ils étaient heureux
Un chemin qu'ils croyaient sans piège, sans ornière.

Ils sont partis d'un pas alerte et triomphant,
Devant eux s'étendaient l'horizon et la plaine
Qu'ils croyaient pour toujours soumis, resplendissants,
La joie pour tous les deux, l'Amour est leur domaine.

La joie, ils l'ont cueillie au fil des découvertes,
Puisant à pleines mains dans cette coupe offerte
De la vie qui commence ainsi qu'un clair matin,
Orgueilleux et naïfs ils narguaient le destin.

Et puis un jour la Vie a surgi de la leur,
La fête est arrivée apportant des berceaux,
Des rires, des sanglots, et la douce chaleur
Du foyer qui se cache derrière les rideaux.

Alors ils ont connu les longues nuits de veille
Au chevet d'un petit, malade, qui sommeille,
Ils ont guetté sa fièvre, attendu le docteur,
Angoissés, sous la lampe, le cœur serré de peur.

Les enfants ont grandi, ouvert tout grand leurs ailes
Pour voler à leur tour, quittant le nid fidèle
Où les parents vieillis attendent leur retour,
Gardant au chaud leur part éternelle d'amour.

En se tenant la main, longtemps ils ont marché,
Parfois l'un est tombé se blessant sur les pierres
Du sentier de traverse où il s'est égaré, 
Car la voie est abrupte et faible de lumière,

Mais toujours, malgré tout, ils se sont retrouvés,
Même si quelquefois le cœur s'accroche aux ronces
Qui bordent le chemin et s'agrippent aux fossés
Quand l'esprit tumultueux dans l'illusion s'enfonce.

Mais à force d'amour et de souffrance ensemble,
Ils ont fini, vois-tu, par bien se ressembler,
Même s'ils sont usés, même si leur voix tremble,
Ils gardent la jeunesse de ceux qui savent aimer.

Maintenant ils sont seuls sur l'Océan tranquille,
Leur esquif vogue en paix vers le Port mystérieux
Vers ce phare inconnu dont la lumière brille,
Jusqu'au jour où leurs enfants leur fermeront les yeux.
   
 

                                                                          Marie-Anne SOLAIR.
 
 
 
   
 
 
 
 

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